"Destination Loubards" sur Jet Fm :
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22h - 23h
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Décembre 2011 , Joyeux Noêl   :

FABRIQUE DE L'ENNUI  


La Fabrique ? Une machine politique de plus pour écraser les scènes alternatives. Comme dans d'autres villes, cette « boîte à musique », que tout le monde applaudit, aura un impact considérable sur tous les bars et lieux indépendants. Ce nouveau jouet culturel est une arme stratégique contre les lieux indépendants qui se battent depuis des années pour faire vivre une autre idée de la culture, de la musique et de la création en général. On justifiera la fermeture de lieux trop embarrassants par l'existence de lieux que seule la mairie a choisis. Son acharnement sur le terrain culturel impose le fait que tout doit rentrer dans des codes très stricts, où tout est pesé, millimétré. Que rien ne leur échappe. Horaires de fermeture, brigade antibruit, videurs, et autres conditions drastiques sont le lot quotidien de tous ceux qui veulent diffuser de la musique en dehors
des salles officielles. Ils veulent avoir le contrôle sur tout. Surtout quand le lieu devient un repère nocturne. Le Fouloir à Saint-Herblain, par exemple, commençait à être trop visible, trop bruyant, trop illégal et surtout il ne rentrait dans aucune des conditions municipales. Il fut fermé, ainsi soit-il!
S'il n'y avait rien dans le paysage culturel nantais, et que des lieux indépendants fermaient, tout le monde crierait au scandale, ça ne passerait pas. Mais il y a tellement de festivités pour nigauds, tellement d'Éléphants, qu'on ne voit plus rien. Des lieux alternatifs ferment et, avec eux, toute la diversité culturelle qu'ils apportaient. Mais personne ne trouve rien à redire. La magie qu'il y avait dans des lieux comme le Fouloir, ou maintenant dans un lieu comme Bitche, ne peut exister dans aucune salle officielle. Qui se souvient de lieux comme le Paradis d'Asie ou le Courtois ? Bientôt plus personne. Et c'est sûr, il n'y aura pas un gros livre comme pour l'Olympic pour retracer leur histoire.
Symptomatique, l'édito du premier programme de La Fabrique : les cinq associations « invitées » à faire partie du projet n'ont même pas une petite ligne pour dire ce qu'elles pensent. Seul parle Jean-Marc Ayrault. Ça donne le ton pour la suite. Les assos devront la fermer si elles veulent garder leurs petites places au chaud. La « culture » ne doit pas échapper au pouvoir de la mairie. Peu d'hommes politiques avant Ayrault auront autant utilisé la culture comme moyen de séduction pour garder le pouvoir. Autrefois, à Nantes, on flattait l'électorat avec du travail à la pelle. Maintenant on le flatte à coup d'Éléphant et de merde culturelle. Une aliénation pour une autre.C'est exactement ça, faire de la politique. Trouver ce qui est vendeur. Et à Nantes, c'est le bizgo de
la culture.
« Nantes, une éternelle fabrique de talent » nous dit Ayrault. Effectivement, on a sûrement ici les plus beaux talents pour faire du chiffre avec la culture. Les fins limiers de la Samoa l'ont bien compris. Une vraie petite clique, ces grands amis des promoteurs immobiliers qui veulent faire de l'île de Nantes, où niche la Fabrique, un paradis pour artistes bon teint. Si t'as des tunes et que t'es un artiste sympa qui fait du fric et pas trop de vague, t'auras peut-être une chance de rester. Et ceux, nombreux, qui avaient leur atelier dans la halle Alstom et qui se sont fait déloger par la Samoa pour être relogés à prix exorbitant ne nous contrediront pas. Passer de 40 euros le m2 à 160 euros le m2 avec même pas une chiotte compris dans la location, il y a de quoi devenir chèvre… Mais bon, il parait que c'est pour aider les créateurs...
Question argent, la Fabrique n'a pas fait les choses à moitié. 28 millions d'euros, rien que ça. À simple titre comparatif, le Fouloir herblinois devait être racheté 250 000 euros par une asso pour un projet de logement et d'activités culturelles. Avec 28 millions, la mairie peut ouvrir 112 lieux comme le Fouloir ! Mais faut avoir envie de se faire racheter, et de s'asseoir sur son indépendance...
Question indépendance, on peut juste dire que les anciens de l'Olympic sont des maîtres ; ils n'ont même pas eu le choix de leur propre nom pour la Fabrique ! Faut dire qu'ils avaient trouvé comme nouveau nom :  «Mon voisin est un éléphant »… C'est vrai que là, on peut applaudir l'idée originale. L'histoire, c'est que comme le nouveau nom — il faut bien le dire — était pourri, le conseil d'administration a choisi pour eux en faisant appel à un intervenant extérieur payé qui trouva la perle : « Stéréolux ». Que de talent et d'idées pour avoir réussi à trouver un nom de frigo pour une salle de musique ! Par ailleurs, dans le projet initial de la Fabrique il devait y avoir une troisième salle, le « Bâtiment C », dédié aux assos. Projet abandonné. Raison officielle : pas assez d'argent. Quand on voit le fric qu'ils avaient, on se demande bien comment ils ont fait ! Mais bon, la vraie raison — un secret de Polichinelle dans les couloirs de la Fabrique — c'est que Stéréolux flippait sérieusement que les petites associations leur fassent grandement de l'ombre. Les petites associations ont cette force qu'elles fidélisent un public et remplissent des salles avec des groupes peu connus ; de quoi se poser des questions sur tout cet argent donné aux gars de Stéréolux pour faire tourner leur bazar, alors que d'autres font un boulot nettement plus passionnant avec pas un kopeck ! Il parait qu'il y a déjà des nostalgiques du défunt Olympic ! Mais de quoi au juste ? Quel mérite a eu cette salle ? D'avoir invité des artistes mémorables comme Émilie Simon ? D'ouvrir ses portes à toutes sortes de styles ? Soyons raisonnables, franchement, le boulot de l'Olympic était à portée de n'importe quelle association de mélomanes un peu au courant de l'actualité musicale. Rien de plus ! Donne une salle comme l'Olympic et autant de pognon qu'en a eu l'asso « Songo » (qui gère les lieux) à n'importe quelle association de musique, et elle te fera un bilan aussi bien, voire nettement mieux ! Et juste pour rappeler, être programmateur d'un lieu comme celui-ci, c'est avant tout avoir un bon sens de la négociation financière. Le bon goût, la découverte, ça passe après. Alors arrêtons avec l'Olympic, c'était une salle aseptisée, chère et sans grande originalité.
Et pour continuer le voyage à Nantes, on peut s'arrêter aussi sur la salle Paul Fort et le Pannonica. Des salles comme ça sont juste une honte pour la création et la musique. Ces deux salles subventionnées marchent au ralenti total. Avec seulement 80 concerts par an, c'est presque autant que ce que fait comme événements un bon café concert, mais sans subventions et en général avec juste une ou deux personnes pour gérer l'affaire ! Et eux que font-ils avec des équipes de huit à dix personnes ? Ils parlent un peu trop de « culture pour tous », d’« ouverture culturelle ». Pourtant avec toutes les subventions qu'ils touchent, on pourrait se dire que ça aurait une influence sur le prix d'entrée. Mais non, des prix qui avoisinent le plus souvent les 10 / 15 euros et encore si ce n'est plus ! C'est navrant. Du coup, ça en fait des lieux repliés sur eux-mêmes, avec des concerts
où on se retrouve à trente personnes, musiciens compris. Expérience vécue. C'est dommage, il suffisait de faire des entrées à prix libre à et tout le monde s'y retrouvait, et les musiciens en premier ! Il y aurait beaucoup plus de monde et d'entrées, beaucoup plus de bières consommées, un gros public et au final, beaucoup plus de fric pour les musiciens. Donnez juste une salle comme le Pannonica à deux ou trois associations déterminées et vous sentirez la différence !
Tous ces lieux, organes puissants de la politique culturelle nantaise, n'ont aucune âme, et n'en auront jamais. Ils sont sans relief, et sans originalité. Ils participent juste à cette marchandisation de la culture, qui dénature tout. Le résultat, c'est que ces endroits sont des lieux de consommation où l'on s'ennuie. Il n'y a pas de vie, un videur t'invite juste à rentrer chez toi dix minutes après la fin du concert. Merci, à la prochaine. Résultat ? Deux ou trois billets en moins dans ton portefeuille. On aimerait bien savoir : combien de personnes, en 22 ans de concerts à l’Olympic, y sont tombées amoureuses ? Vraie question, ça, qui donne la mesure de l'ampleur du désastre. La Fabrique vient d'ouvrir, espérons que Bitche, un des derniers lieux indépendants, ne commence pas soudainement à avoir des problèmes avec la mairie… Si on veut préserver la richesse culturelle et sociale d'un tel lieu, il va falloir se bouger l'arrière-train sérieusement. Le Fouloir a été perdu, battons nous pour que Bitche tienne le plus longtemps possible.
Les Loubards pédés   



FERMETURE ECLAIR DU FOULOIR :   (Décembre 2010 )

Le Fouloir s’est fait tuer ?
Cela fait maintenant cinq ans que nous squattons le lieu-dit Le Fouloir à Saint-Herblain, en périphérie de Nantes. La maison était à l’abandon depuis une dizaine d’années. Nous en avons fait notre résidence principale mais l’endroit sert également de studio de répétition, d’atelier mécanique, d’atelier sérigraphie, de salle de spectacle… En décembre 2006, nous organisions une première soirée, suivie d’une cinquantaine d’autres, accueillant plus de 200 groupes de musique, du théâtre, de la danse, du cinéma, des débats. Notre approche fut toujours politique, tant par des soirées de soutien (inculpés de Vincennes, lutte contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, etc.) que par notre volonté de faire vivre la musique dans un lieu indépendant et financièrement accessible à tous. Nous avons donné de l’importance aux faits que dans ce lieu aucun vigile ne soit présent lors des événements, qu’on puisse fumer, qu’il n’y ait pas de limite d’heure et de décibels, qu’on puisse passer une très bonne soirée sans y engager son RMI et que, pour finir, ce lieu permette de belles rencontres… En accord avec nos idées, aucun événement n’a reçu de subventions et nous avons toujours maintenu un « prix libre » à l’entrée. À ce jour, notre association compte plus de 3 000 adhérents. Mais l’activité du Fouloir va s’arrêter là.
Nous avions en 2008 trouvé un accord avec l’association Une famille un toit afin qu’elle rachète le lieu et nous le loue à un prix raisonnable. Malgré un engagement officialisé juridiquement, ladite association n’a plus donné  de nouvelles depuis mars dernier – sans que nous en soyons avertis. Un procès a eu lieu en septembre, mettant en confrontation Me Dubois, notaire chargé du Fouloir, et ladite association. Conclusion fin octobre 2010 : expulsion immédiate de toutes les personnes résidant au Fouloir. Tout cela nous a menés à la mairie de Saint-Herblain afin d’y rencontrer un responsable proche du maire et de tenter de négocier un délai de quelques mois (la fameuse trêve hivernale). Nous avons été reçus par Mickaël Bonraisin, directeur de cabinet de la Ville de Saint-Herblain. Il a été clair d’emblée que la mairie ne bougerait pas le petit doigt en notre faveur et n’appuierait aucune demande de délai avant l’expulsion. Comble du cynisme bureaucratique, M. Bonraisin nous a annoncé que la mairie de Saint-Herblain était à présent intéressée par le rachat du lieu – tout en ne l’assumant pas officiellement depuis 2 ans – et qu’elle prévoyait de le détruire pour y construire des HLM pour « personnes en difficultés » ! On touche le fond…
Quand on connaît le rendement financier et politique pour une mairie d’une barre HLM, on comprend que le maintien de précaires dans un lieu déjà construit est moins intéressant. Cette réponse révèle bien la démarche électoraliste de cette mairie de gauche qu’est Saint-Herblain. Rien de très nouveau, ce qu’ils veulent ce sont des bons pauvres, qui savent rester à leur place sans besoin de les matraquer. En somme ceux qui se taisent, pas ceux qui, comme nous, font du bruit et refusent de suivre la logique de Nantes Métropole.
Aujourd’hui on s’est bien fait planter et la mairie veut s’emparer du Fouloir coûte que coûte. Autant dire que nos choix sont limités… Notre date d’expulsion est fixée au 14 janvier 2011. Nous avons pendant ces cinq
années beaucoup travaillé pour prouver que Le Fouloir pouvait devenir un lieu important pour la culture alternative, pour la musique indépendante et la création en général. Et perdre ce lieu, c’est perdre un espace de liberté et de lutte.
Le pouvoir n’aime pas ce qui lui échappe. Et c’est justement ce que nous voulons, lui échapper un minimum et montrer qu’on peut faire et créer sans attendre l’aval de quiconque. Nous savons qu’il y a énormément de personnes, d’associations, de groupes qui sont solidaires et concernés par cette affaire. De notre côté nous tenons à démontrer la nécessité et la cohérence d’un lieu comme Le Fouloir. C’est pourquoi nous vous invitons à nous faire part de vos lettres et textes de soutien car nous en aurons besoin. Vous pouvez aussi largement contribuer à cette lutte en manifestant vos réactions, par tous les moyens possibles, aux autorités concernées : lettres, mails, téléphone ou autre…
Nous sommes aussi à la recherche de lieux sur Nantes et ses environs qui nous permettraient de continuer à faire vivre une certaine idée de la culture alternative. Vos idées sont les bienvenues.